sergiobelluz

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Aujourd’hui, avoir un beau phtisique ne suffit plus.

Ce n’est qu’en 1820 qu’on isola la tuberculose des autres maladies pulmonaires. En 1882, Koch en découvrit le fameux bacille. En 1921, le Bacille de Calmette et Guérin donna ses initiales au vaccin BCG. Le terme même de tuberculose n’a été adopté qu’au milieu du XIXe, à cause des renflements en forme de tubercules trouvés chez les malades. Et avant ?

 

La tuberculose gothique

Avant, on ne souffrait pas de tuberculose mais de consomption, de « combustion interne ». On était fatigué, livide, maigre, on avait les yeux rouges et bouffis, sensibles à la lumière, on crachait du sang et on mourait inexplicablement. L’entourage suivait peu après. D’où l’idée que la première victime revenait s’alimenter sur ses proches et la naissance du mythe du vampire – le mot apparaît en 1725 – immortalisé bien plus tard par le célèbre Dracula (1897) de l’écrivain irlandais Bram Stoker, qui associera son personnage du comte Dracula au sanglant et historique Vlad Tepes, prince de Transylvanie, surnommé « l’empaleur » pour ses méthodes originales de torture.

 

La tuberculose romantique

Apparaîtront alors les grands phtisiques (du grec « phtisis », consomption), souffrant d’une « maladie de langueur », consumés par leurs passions : Keats, le poète, mort à 26 ans, Chopin, le compositeur mort à 39 ans, Marie Duplessis, la courtisane, morte à 23 ans. Dumas fils la prendra comme modèle pour créer la plus célèbre poitrinaire de l’histoire, Marguerite Gautier, dans son roman La Dame aux camélias (1848).  Il en fera une pièce que joueront Sarah Bernhardt et toutes les stars depuis 150 ans. Cette prostituée de luxe, qui mourra d’avoir trop aimé, devint un mythe.  En 1853, Verdi s’en empara, la renomma Violetta Valery pour son opéra La Traviata (« la dévoyée »), dont Maria Callas fut une très grande interprète. En 1937, Cukor en fera un film, Camille (en référence aux fameux camélias), avec une Greta Garbo magnifique de mélancolie. Bolognini reviendra au personnage historique avec sa Dame aux Camélias (1981), où l’on retrouvera une Marie Duplessis (Isabelle Huppert) se soignant au sang de bœuf frais, comme cela se faisait alors.

 

Le XXe siècle : La tuberculose décadente et la pandémie

Dans La  Montagne Magique (1924), le roman de Thomas Mann, la tuberculose devient une maladie sociale révélatrice du mal de vivre de la haute bourgeoisie européenne. L’élégant sanatorium, inspiré de celui de Davos, a ses fétiches et ses rituels : crachoirs de luxe, chaises longues, repos forcé sur la terrasse face aux montagnes, thé, dîners copieux, jeux de société et morts discrètement évacués…

 

Et aujourd’hui ?

 

Fini les sanatorium : ce sont les populations les plus défavorisées qui sont touchées. Reflet fidèle de notre époque, la tuberculose s’est globalisée. Elle est en constante augmentation à cause du VIH et c’est à l’échelle mondiale qu’on cherche à l’éradiquer.

 

Et dans l’imaginaire, la tuberculose a cédé sa place au SIDA pour exprimer l’angoisse des sociétés face à la maladie et à la mort, comme on peut le voir par exemple dans Les Nuits Fauves de Cyril Collard (1992) ou dans Philadelphia de Jonathan Demme (1993).

 

©Sergio Belluz, 2015

 

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Illustrations :

 

Bram Stoker’s Dracula (1992), film de Francis Ford Coppola, avec Gary Oldman, Winona Ryder, Anthony Hopkins, Keanu Reeves. Uca catalogue

 

Camille (1937), film de George Cukor, avec Greta Garbo et Robert Taylor. MGM Home Entertainment

 

Thomas Mann, La Montagne magique (Der Zauberberg) de Thomas Mann (1924), Paris : Le Livre de Poche.



15/05/2015
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