sergiobelluz

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Oriana Fallaci, sur la liberté et sur la famille.

« Tu entendras beaucoup parler de liberté. Ici, chez nous, c’est un mot aussi éculé que le mot amour qui, je te l’ai déjà dit, est le plus éculé de tous. Tu rencontreras des hommes qui se font couper en morceaux pour la liberté, qui subissent des tortures, en espérant de mourir. Et j’espère que tu seras un de ceux-ci. Mais, au moment-même où tu te feras torturer pour la liberté, tu découvriras qu’elle n’existe pas, qu’elle existait tout au plus que pour autant que tu sois à sa recherche : comme un rêve, une idée née d’un souvenir de ta vie avant de naître, quand tu étais libre parce que tu étais seul. Je continue à répéter que tu es prisonnier là-dedans, je continue à penser qu’il y a peu d’espace et que dorénavant tu seras même dans l’obscurité : mais dans cette obscurité, dans ce peu d’espace, tu es libre comme tu ne le seras jamais plus dans ce monde immense et sans pitié. Tu n’as à demander permis à personne, à demander de l’aide à personne, là-dedans. Parce que tu n’as personne à tes côtés et que tu ignores ce qu’est l’esclavage. Ici, au dehors, au contraire, tu auras mille patrons. Et ton premier patron, ce sera moi, qui, sans le vouloir, peut-être sans le savoir, t’imposera des choses qui sont justes pour moi mais pas pour toi. Ces jolis petits souliers, par exemple. Ils sont beaux pour moi, mais pour toi ? Tu crieras, tu hurleras quand je te les enfilerai. Mais je te les enfilerai quand même, peut-être en soutenant que tu as froid, et tu t’habitueras un peu à chaque fois. Tu te plieras, vaincu, au point de souffrir si tu ne les as plus. Et ce sera le début d’une longue chaine d’esclavage dont le premier anneau sera toujours représenté par moi, puisque tu ne pourras pas rien faire sans moi. Moi, qui te nourrirai, moi qui te couvrirai, moi qui te laverai, moi qui te porterai dans mes bras. Et puis tu commenceras à marcher par toi-même, à manger par toi-même, a choisir toi-même où tu veux et quand tu veux te laver. Mais alors surgiront d’autres esclavages. Mes conseils. Mes leçons. Mes recommandations. Ta propre peur de me faire du chagrin en faisant des choses autres que celles que je t’aurai enseignées. Beaucoup de temps coulera, à tes yeux, avant que je te laisse partir comme les oiseaux que les parents chassent du nid, le jour où ils savent voler. Ce temps viendra enfin, et je te laisserai partir, je te laisserai traverser la rue tout seul, feu vert et feu rouge. Je t’y pousserai. Mais ça n’augmentera pas ta liberté, parce que tu resteras enchainé à moi par l’esclavage des affections, l’esclavage du regret. Certains appellent ça l’esclavage de la famille. Je ne crois pas à la famille. La famille est un mensonge construit par celui qui a organisé ce monde pour mieux contrôler les gens, en exploiter le mieux l’obéissance aux règles. On se rebelle plus facilement quand on est seul, on se résigne plus facilement quand on vit avec d’autres. La famille n’est que le porte-parole d’un système qui ne peut pas te laisser désobéir, et sa sainteté n’existe pas. Il n’existe que des groupes d’hommes et de femmes et d’enfants contraints à porter le même nom et à habiter sous le même toit : en se détestant, en se haïssant, souvent. Mais le regret existe, et les liens existent, enracinés en nous comme les arbres qui résistent même à l’ouragan, ou aux inévitables faim et soif. Tu ne peux jamais t’en libérer, même si tu essaie avec toute ta volonté, ta logique. Des fois tu crois les avoir oubliés et un jour ils réapparaissent, irrémédiablement, sans pitié, pour te mettre la corde au cou pire que les boeufs. Et pour t'étrangler. »

 

 

Oriana Fallaci, Lettera a un bambino mai nato (Milano : Rizzoli, 1975), ma traduction.

 

 

1975 Fallaci Oriana Lettera.jpg

 

L’original:

 

« Udrai molto parlare di libertà. Qui da noi è una parola sfruttata quasi quanto la parola amore che, te l’ho detto, è la più sfruttata di tutte. Incontrerai uomini che si fanno fare a pezzi per la libertà, subendo torture, magari accettando la morte. Ed io spero che sarai uno di essi. Però, nello stesso momento in cui ti farai straziare per la libertà, scoprirai che essa non esiste, che al massimo esisteva in quanto la cercavi : come un sogno, un’idea nata dal ricordo della tua vita prima di nascere, quando eri libero perché eri solo. Io continuo a ripetere che sei prigioniero lì dentro, continuo a pensare che hai poco spazio e che d’ora innanzi starai perfino al buio : ma in quel buio, in quel poco spazio, tu sei libero come non lo sarai mai più in questo mondo immenso e spietato. Non devi chiedere permesso a nessuno, aiuto a nessuno, lì dentro. Perché non hai accanto nessuno ed ignori cosa sia la schiavitù. Qui fuori, invece, avrai mille padroni. E il primo padrone sarò io che senza volerlo, magari senza saperlo, ti imporrò cose che sono giuste per me non per te. Quelle belle scarpine, ad esempio. Sono belle per me ma per te ? Griderai ed urlerai quando te le infilerò. Ma io te le infilerò lo stesso, magari sostenendo che hai freddo, e un po’ alla volta ti ci abituerai. Ti piegherai, domato, fino a soffrire se ti mancheranno. E questo sarà l’inizio di una lunga catena di schiavitù dove il primo anello verrà sempre rapprensentato da me, visto che tu non potrai fare a meno di me. Io che ti nutrirò, io che ti coprirò, io che ti laverò, io che ti porterò in braccio. Poi incomincerai a camminare da te, mangiare da te, a scegliere da te dove andare e quando lavarti. Ma allora sorgeranno altre schiavitù. I miei consigli. I miei insegnamenti. Le mie raccomendazioni. La tua stessa paura di darmi dolore facendo cose diverse da quelle che ti avrò insegnato. Passerà molto tempo, ai tuoi occhi, prima ch’io ti lasci partire come gli uccelli che i genitori buttano fuori dal nido, il giorno in cui sanno volare. Infine quel tempo verrà, e io ti lascerò partire, ti lascerò attraversare la strada da solo, col verde e col rosso. Ti ci spingerò. Ma quelsto non aumenterà la tua libertà perché mi resterai incatenato con la schiavitù degli affetti, la schiavitù del rimpianto. Alcuni la chiamano schiavitù della famiglia. Io non credo alla famiglia. La famiglia è una menzogna costruita da chi organizzò questo mondo per controllare meglio la gente, sfruttarne meglio l’obbedienza alle regole. Ci si ribella più facilmente quand si è soli, ci si rassegna più facilmente quando si vive con altri. La famiglia non che è il portavoce di un sistema che non può lasciarti disubbidire, e la sua santità non esiste. Esistono solo gruppi di uomini e donne e bambini costretti a portare lo stesso nome ed abitare sotto lo stesso tetto : detestandosi, odiandosi, spesso. Però il rimpianto esiste, e i legami esistono, radicati in noi come alberi che non cedono neanche all’uragano, inevitabili come la fame e la sete. Non te ne puoi mai liberare, anche se ci provi con tutta la tua volontà, la tua logica. Magari credi di averli dimenticati e un giorno riaffiorano, irrimediabilmente, spietati, per metterti la corda al collo più di qualsiasi boia. E strozzarti. »



15/12/2015
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