sergiobelluz

Superbe autobiographie: l’auteur et son double, un fantôme. Très sophistiqué, très élégant, en noir et blanc pour la partie dialogue avec le fantôme – le fantôme étant le dessin de l’auteur, informe et capable de prendre forme(s) – qui se passe au Japon et dans l’avion retour du Japon, ainsi qu’à Paris.

Il y a toute une partie intercalée qui est le récit en couleur « sépia » ou «  brou de noix » comme le dit le personnage, que le dessinateur fait à son dessin fantôme d’un reportage, une commande du magazine Géo, à Recife. Le dessinateur explique combien c’est difficile d’éviter les clichés (Brésil, Carnaval, Négritude, etc…) et qu’en tant que dessinateur il n’y avait que deux options dans ce type de travail : dessiner sur le vif, dans la rue, mais alors les gens viennent toujours voir ce que vous faites (on tombe dans le cliché, mais on a le contact avec les gens), ou se laisser imprégner puis, seul, dans sa chambre d’hôtel, voir ce qu’on retient et retranscrire la réalité, solution qu’il préfère, même s’il n’aime pas se retrouver seul, et qu’il y a quelque chose d’artificiel là-dedans.

Album très original, très autobiographique, très audacieux formellement, très élégant aussi, et une manière de recycler intelligemment son reportage sur le Brésil. Les dialogues entre le dessinateur et son dessin font beaucoup penser à Pirandello, à une mise en abyme.

Panorama du roman graphique* # 68: Nicolas de Crécy, 'Journal d’un fantôme' (Paris: Futuropolis, 2007)

(la suite au prochain épisode)

*On devrait dire « narration graphique »: sous l’étiquette commerciale de « roman graphique » (de l’américain « graphic novel ») sont réunies des bandes dessinées pour adultes où l’on trouve fictions, biographies, récits de voyage ou reportages.

©Sergio Belluz, 2015.