Malbouffe sans va-t-en guerre, mironton, mironton, mirontaine.
Je suis très étonné de voir à quel point la dimension sociale ou familiale des repas est en train de disparaitre. Les trains suisses, par exemple, sont devenus des aires de pique-nique, on y transporte son rata dans des tupperwares, on a son thermos pour le café (quand on ne l’a pas acheté sur le quai) et, en mangeant son repas, on écoute la radio ou de la musique sur oreillette, bien en soi, bien isolé, bien ignorant du monde extérieur et de son voisin.
Les frontières entre la vie privée et la vie sociale, ou plutôt les limites de la sphère privée se sont extraordinairement modifiées : ce qui, auparavant, était considéré comme indécent, manger en public, par exemple, est presque devenu la norme, sans doute à cause de la pression de nos sociétés, pour lesquelles le temps doit être comptabilisé au plus grand profit de l’économie, et qui considèrent que ces pertes de temps humaines (vivre, manger, dormir, faire l’amour, déféquer...) doivent être limitées au maximum, par des horaires, des contrôles, des timbreuses, des interdictions, des impossibilités matérielles...
Du coup, ce domaine « privé » empiète de plus en plus sur le domaine « public ». On gagne du temps en mangeant, pendant le trajet de bus ou de train, sa salade achetée à la Migros du coin, et on déjeune dans le train puisque « pour gagner du temps » on s’est levé juste à temps pour se doucher et pour partir.
Il n’est pas loin le temps où, pour des questions rationnelles et tout à fait défendables (déplacements inutiles, crise du logement, coût des bureaux, etc...), on généralisera le télétravail, chacun dans sa bulle productive.
Comme des poules en batterie.
©Sergio Belluz, 2017, le journal vagabond (2016).
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