Avec Brigitte Balleys et Lionel Monnet, ‘Le Voyage d’hiver’ de Schubert fait chaud au coeur
Toute la beauté d’un luxueux début d’automne hier, à Saxon, en Valais : un coucher de soleil éclatant qui éclairait les vignes mordorées, un peu de vent pour faire bruisser les arbres, quelques grappes de raisin noir comme un rappel de l’été qui s’en va....
Un après-midi idéal pour se plonger dans la sublime mélancolie du ‘Winterreise’ (1827) de Schubert que proposait hier, dimanche 21 octobre, la mezzo-soprano suisse Brigitte Balleys accompagnée par le pianiste Lionel Monnet dans le cadre parfait de Consonance, un espace de concert et un studio d’enregistrement créés et gérés par le pianiste et son épouse depuis 2013.
Ce ‘Voyage d’hiver’ a été passionnant à plus d’un titre : si les vingt-quatre poèmes de Wilhelm Müller sur les déboires amoureux du poète ont été à l’origine composés pour voix de ténor, les barytons en ont fait un des classiques de leur répertoire et c’est tout à l’honneur de la grande mezzo Brigitte Balleys de relever le défi et d’en proposer sa version, avec toute la précision et l’intelligence du texte qu’on lui connait.
Sa méthode ? Préparer le terrain, expliquer au public les états d’âme, les émotions, les changements d’humeur du poète, sa tristesse, son amertume, son désespoir saupoudrés d’une touche passagère d’illusion et de fausse gaieté.
Et ce qui devait être un énième récital du ‘Winterreise’ est devenu une soirée passionnante où Brigitte Balleys la Charmeuse a mis tout son monde dans sa poche avec sa spontanéité et sa générosité ordinaires.
Le public – une salle pleine et pas forcément de connaisseurs – suivait avec attention, conquis à la fois par la beauté sombre de ce cycle de Lieder et par la personnalité, l’expressivité et la voix chaude, intime de Brigitte Balleys, si nuancée, si juste à chaque fois.
L’accompagnement de Lionel Monnet était à la hauteur, d’une très grande souplesse, d’une très grande sensualité magnifiée par la magnifique sonorité du Steinway de concert qui redonnait à la musique de Schubert toute sa volupté sombre.
C’est assez rare d’assister à un récital qui dit quelque chose, qui communique quelque chose, qui va au-delà du pot-pourri servant à mettre en valeur les interprètes – souvent au détriment des œuvres – et c’est tout l’art de l’étonnante Brigitte Balleys de casser les codes formels pour redonner la place d’honneur à la musique et à la poésie et pour transmettre toute la beauté sombre de ce ‘Winterreise’.
©Sergio Belluz, 2018, le journal vagabond (2018).
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